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Lorsque j'étais une oeuvre d'art par Eric-Emmanuel Schmitt

Lorsque j'étais une oeuvre d'art
Présentation (site auteur) :
"Un jeune homme, au-dessus de la falaise de Palomba Sol, est en train de manquer son énième suicide. S' il le rate cette fois, c'est à cause d'un intrus qui l'invite à le suivre, Zeus-Peter Lama. Ne pas connaître Zeus-Peter Lama, c'est avoir " de l'avoine à la place du cerveau ! " Il est l'artiste mondialement connu qui fait fureur dans le monde des arts et qui sait faire le bruit qu'il faut pour que la fureur s'en suive. Il emmène notre faux suicidé à l'Ombrilic, sa demeure, et lui propose un pacte méphistophélique: lui faire don de sa personne afin que Zeus le transforme en œuvre d'art vivante. Le don concerne le corps du jeune homme car, pour ce qui est de l'âme, on en est plus au temps de Faust!
A coups de scalpel il le métamorphosera en beau monstre, sexuellement performant, qui fera se pâmer les oies blanches des expositions mondaines. Rebaptisé Adam bis, le garçon connaît la célébrité, vaut de l'or et pense avoir tout gagné jusqu'à ce qu'il découvre qu'il a perdu sa liberté…
"

Pourquoi je l'ai apprécié :


Intriguée par des commentaires lus ici et là, par le thème (comment un homme pouvait-il être une oeuvre d'art ? quels engagements impliquaient la rencontre avec son mystérieux "bienfaiteur" ?), j'ai lu ce roman sans m'interrompre. Dérangeant, intrigant, révoltant, touchant également... Il fallait avoir terminé rapidement afin de pouvoir reposer ce livre. Aucune idée neuve en ce qui me concerne, mais une juste dénonciation des excès pseudo-artistiques. Jusqu'où peut-on aller pour l'art ? Jusqu'à la mutilation, y compris d'autrui ? L'autre peut-il devenir un simple objet ? Notre société serait-elle capable de nier la conscience d'un être humain sous prétexte d'oeuvre artistique ? Qu'est-ce que l'art ?
L'auteur mène en effet toute une réflexion autour du scandale pseudo artistique, sur ce qui est le plus susceptible d'être vendu : ce dont on parle comme si le talent était finalement secondaire, comme si le talent-passion sans préoccupation de mise en scène était destiné à rester dans l'ombre des coups d'éclat médiatiques et mercantiles... Sommes-nous si loin de la réalité ?...
Réflexion également autour de la liberté : on peut consentir à être un objet pour oublier (ici des inquiétudes fondées sur l'apparence, apparence qui sévit furieusement dans nos sociétés modernes), puis réaliser peu à peu que la liberté de ressentir est alors gommée... Est-il alors possible de faire marche arrière et comment ?
Réflexion autour de l'apparence, cette apparence trop souvent aliénante. Ici le personnage principal va jusqu'à désirer mourir pour une apparence trop banale, jusqu'à oublier l'amour des siens...
Toutes ces réflexions s'entrechoquent, laissant un goût amer dans la bouche : l'art déformant n'est plus art, il est devenu violence... Un livre certainement difficile à oublier et tout à coup une question : de quel art littéraire s'agit-il: de celui du paisible Hannibal ou de celui du féroce Zeus Peter Lama ?
Ma sensibilité a certes été malmenée, j'ai ressenti colère et désespoir face à cette solitude, cet aveuglement des contemporains d'Adam bis face à ce qu'il endurait. Y aurait-il tant d'indifférence si cela se produisait ? Pourtant un tel livre nécessitait sans doute d'être écrit.
Pour le contenu tout d'abord, pour cette réflexion menée autour d'un pseudo art et du règne de l'apparence (apparence qui se niche donc également dans cet attrait pour une prétendue oeuvre d'art humaine).
Mais également pour l'écriture : troublante, déstabilisante, ressemblant à l'oeuvre ici dépeinte...

Des lectures réflexion ici. 

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